Bernard Leclercq : 2 CV, Mongolie, Chine et son chemin de vie
Écrit par Best of Verviers   
Mardi, 04 Mai 2010 21:27

Plus de dix mois se sont écoulés après leur périple en 2cv. Celui qui les a mené de Mongolie jusqu’en Chine.
Bernard Leclercq, l’intrépide verviétois qui a emmené sa femme au bout de ses rêves et dont nous avions suivi le périple, répond à nos questions sur la vie, ses rencontres, les gens.

La 2CV, c'est un peu le monde de la débrouille. Tout se répare, tout se solutionne, et elle passe partout, jusqu'au bout du monde nous avais-tu dit.

Quand je raconte autour de moi les problèmes que nous avons eus, les gens me regardent avec des yeux immenses de pitié et de détresse pour nous.

Nous avons du mettre plusieurs fois la voiture sur le flanc pour resserrer la suspension avant. Ensuite, on a même du souder quelques pièces pour être tranquille. Puis, les bras des roues arrières ont plié plusieurs fois. On a donc redressé le tout puis ressoudé les renforts.
Un support d'amortisseur nous a laissé tomber plusieurs fois aussi. Rebelotte, on démonte, on ressoude, puis on repart.
C'est impossible de faire cela avec une voiture moderne. La 2CV, c'est une mécanique simple. De base. La voiture peut très bien rouler avec les roues de travers pendant des kilomètres car tout est surdimensionné et même si quelque chose n'est pas dans l'axe, ce n’est pas grave. Ca tient.
A part quelques pièces bien spécifiques à la voiture, c'est comme un "mécano". Il suffit d'avoir un poste à souder. C'est pour cela que le "deuchiste " n'hésite pas à parcourir le monde. Il y a toujours un poste à souder même dans la ville la plus proche.


- Raconte-nous quelques souvenirs de rencontres avec des gens en Mongolie ou en Chine.
Mongolie: Nous avons livré des panneaux solaires (sponsors Verviétois) à un Français qui a épousé une Mongole et fondé sa famille là-bas. Ils ont un projet de reforestation du désert.
Cela nous a permis d'entrer en contact directement le peuple de la ville. Là, c'était facile de communiquer. Nous avions l'interprète sur place. Mais c'était trop court. On s'est promis de revenir avec un peu plus de temps!
Dans les steppes, c'était plus difficile, mais c'était surtout très riche. Je me souviens que nous étions en train de rouler tranquillement sur une piste très caillouteuse quand nous croisons deux gars avec leur moto. Ils étaient avec leurs habits typiques et leurs grands yeux étonnés, comme nous avions l'habitude de voir. Ils nous font signe comme beaucoup d'autres et je décide de m'arrêter pour le plaisir de partager un échange. Je m'arrête donc. Je sors de la voiture et  le premier contact fût une très sérieuse poignée de main l'une serrant fortement les doigts, l'autre prenant l'avant bras bien fermement. Ils avaient un sourire à l'horizontal. Ils faisaient le tour de la voiture en demandant pour voir à l'intérieur, regarder les sièges, voir le moteur. C'était génial. Quel "passeport de convivialité " cette voiture. Ils ont posé devant la voiture fièrement et nous avons encore échangé quelques gestes de camaraderie sur l'épaule de chacun. C'était chaud.
Le peuple Mongol est très chaleureux et accueillant. Ils sont toujours prêts à rendre service.

 


- La Chine et les droits de l'Homme, as-tu pu percevoir certaines choses qui t’interpelaient?
Nous sommes un des rares groupes étrangers et aussi important en nombre à pouvoir  traverser la frontière chinoise. Nous avions comme consigne de traverser le pays en restant groupés (Cela est vite devenu impossible !). Une voiture nous suivait et dès qu'il y avait une panne, un homme venait toujours voir ce que nous faisions sans rien toucher puis retournait dans la voiture "balai". Dans cette voiture, il y avait un personnage qui ne sortait pas de son siège. Nous avons appris par la suite qu'il contrôlait si nos réparations était correctement réalisée avant de nous laisser repartir.
Tout est "carré" en Chine. Le matin il y a quelqu'un qui vient frapper sur votre porte pour s'assurer que vous êtes bien debout. Dans certains restaurants chinois plus touristiques, il y a une ambiance extrêmement tendue. Les gens n'ont pas trop le sourire. Par contre, nous nous sommes arrêtés plusieurs fois un peu à l'improviste, que ce soit dans des villages ou dans un petit restaurant bien typé, et là, les gens sont super accueillants et très charmants. On a bien ri avec eu.
  Ça, c'est la chine. Un contraste total. Quand nous avons passé la frontière, nous avons vraiment été déstabilisé par ce contraste en question. On ne savait pas très bien quoi penser, ni quelle opinion se faire. Alors comme d'un avis général, on a laissé venir les situations comme elles venaient et tout s'est bien fini.
Si un jour vous visitez la Chine, vous allez très certainement commencer par visiter Pékin et la site interdite, visiter les palais d'été et d'hiver puis encore un opéra ou l'autre etc
Nous, nous avons fait cela aussi, mais avant, nous sommes rentrés par la toute petite porte des coulisses de l'arrière cour au fond du couloir à gauche.  Et donc ça, c'est pas pareil du tout.


- Vit-on des réalités très différentes là-bas aux confins des steppes par rapport à chez nous ?
Nous n'avons pas côtoyé la misère directement et c'est tant mieux car personne n'a besoin de vivre cela. On a plutôt vu des gens simples avec le sourire. Ils ne sont pas spécialement malheureux de ce que j'ai pu côtoyer. Ils n'ont pas facile, c'est vrai, mais ils vivent avec ce qui les entoure et avec ce que "dame nature" leurs apporte. C'est donc très instable comme situation.
Les enfants sont tous scolarisés. Le gouvernement désirerait rassembler les peuples autour des grandes villes mais bien souvent ils ne veulent pas. Ils préfèrent rester libres, nomades et en phase avec leurs convictions.
La misère existe, surtout dans les grandes villes. Il n'y a pas beaucoup de travail et c'est l'Etat qui est le premier employeur Mongol.
Alors c'est évident que de vivre dans une tente au milieu d’étendues à perte de vue durant toute sa vie ou bien vivre dans un bloc de béton bien isolé de tout, c'est plutôt différent.


- Penses-tu que nous sommes vraiment plus heureux avec toute notre modernité ?
Évidement que bien sûr que non. Et ce qui me fait bondir ce sont les personnes qui s'en rendent compte mais qui ne font rien pour changer par paresse. Car évidement ce n’est pas facile de se priver de confort puisque tous autant que nous sommes, et moi aussi, nous travaillons pour assurer le nôtre.  Mais on oublie l'essentiel.
Je roule tous les jours avec un véhicule mobile, avec 4 roues, un siège, un volant, un moteur et un toit. Et cet engin me transporte d'un point "A" vers un point "B". C'est tout. Et je suis tous les jours sur la route. Mais de quoi avons nous besoin de plus bon sang! D'aller plus vite, pour ramener plus de sous que le copain, de pouvoir tirer son écharpe par ce qu’on a la régulation de température incorporée, d'avoir une voiture plus belle que celle du voisin. Allons bon cela rime à quoi !
Mais nous vivons dans un monde moderne et nous ne saurions pas changer une machine économique aussi montreuse. Simplement, changeons alors notre mentalité alors peut-être?
Mais le retour à la simplicité à un prix. Et si nous ne savons pas le faire nous-même, c'est "Dame nature" qui le fera pour nous, un jour ou l'autre.
 

- On vit dans un monde fou, entend-on souvent. L'as-tu particulièrement ressenti durant ton raid ?
C'est ce raid qui était surtout un peu fou !

 
- Parle-nous des paysages si singuliers que tu as pu découvrir.

Magnifique, des étendues à perte de vue. Le matin, de la poussière, l’après midi, du sable et le soir des grêlons. Quel pays !
Les photos parlent bien mieux que les mots.360° de ... rien !

- Quelles valeurs t'ont plu dans le raid que tu as effectué ?

L'entraide du groupe, c'est clair.
Le retour aux sources de la simplicité.
Des  moments intenses dans notre couple.
Le goût du voyage.


- La rêve, une fois terminé, reste-t-il longtemps dans ta tête ou réfléchis-tu à de nouvelles aventures ?
Nous sommes déjà rentré depuis plus de 10 mois maintenant. C'est comme si j'étais rentré hier. Par contre, voila seulement maintenant que je trouve des mots pour le raconter.
Oui je repense à de nouvelles aventures, surtout que maintenant je sais que le rêve est réalisable.


- La Belgique est ton pays. Verviers, ta ville. Lorsqu'on s'éloigne des repères connus, la perception qu'on a des choses du quotidien change. Quel serait ton projet, ton idée pour notre ville et région ?
Je suis surtout très content d'avoir pu trouver des collaborateurs verviétois qui ont voulu rêver un peu avec nous et qui nous ont encouragé dans ce projet.
Au départ je le faisais pour moi. Ensuite, j'ai remarqué que les gens voulaient rentrer dans mon rêve pour partir un peu ensemble. C'est génial d'être un tel ambassadeur non!


- Pour quelles raisons peut-on s'estimer heureux ?
Nous habitons une magnifique région. Ne la gaspillons pas.

Merci Bernard pour cet échange sur la vie, ses valeurs, ses rencontres, les petits bonheurs et la simplicité

Mise à jour le Lundi, 17 Mai 2010 05:56