Katanga Business |
Écrit par Jean Wiertz | ||
Jeudi, 23 Avril 2009 19:42 | ||
Dans « Katanga Business », actuellement sur les écrans, il s’intéresse aux processus économiques en cours autour des anciennes installations de la Gecamines.Le film s’ouvre sur quelques séquences très fortes, consacrées au sort des 125000 creuseurs, qui tirent leur subsistance en exploitant illégalement des mines de cuivre : creusement des galeries à la main, sortie des minerais dans des sacs, accidents mortels, rites et chants entourant l’inhumation des victimes, et puis négociation des prix dans un comptoir commercial.Le cinéaste s’intéresse ensuite au gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi (papa Moïse pour la population) : personnage attachant, féru de football, mais également soucieux d’assurer un minimum d’avenir à la population. Il essaie de soutenir les creuseurs, les ouvriers en grève, tout en étant obligé de ménager les investisseurs privés ou publics, sans lesquels aucun développement de la région n’est possible. On le voit, avec la police et une équipe de contrôleurs, faire la chasse aux pilleurs, qui opèrent à partir de mines non répertoriées, de comptoirs commerciaux secrets, de convois de marchandises non déclarées, avec la complicité des douaniers.
Les séquences consacrées à la population congolaise sont alternées avec celles consacrées aux investisseurs qui souhaitent relancer les activités de la Gécamines : industriels belges, fonds de pension canadiens, ou techniciens chinois…Il nous ramène aussi d’impressionnantes images tournées lors d’une manifestation des creuseurs, et d’un mouvement de grève des ouvriers, tous deux réprimés dans le sang. A une approche linéaire, thème par thème, le réalisateur a substitué une approche morcelée, passant d’un personnage à l’autre, pour revenir à lui plus tard : le résultat final est tel qu’on est captivé du début à la fin par ce documentaire, qui dépasse les deux heures.Le regard que porte le cinéaste sur chacun des protagonistes est infiniment respectueux : tous y agissent en fonction de leur propre logique. Cette logique leur est dictée par un système déshumanisé, « La Main invisible du Marché », monstrueux avatar de la liberté et de la démocratie, invoquée par diverses institutions économiques et financières pour maximaliser leurs bénéfices.
Le film nous fait comprendre que cette organisation du monde rend quasi impossible l’émergence d’un pouvoir politique structurant, sans lequel un quelconque développement du pays ne peut être envisagé.Et les images de ces ouvriers et creuseurs congolais, besogneux, dignes et pacifistes, nous renvoient directement à celles de nos fermiers obligés de vendre leur lait à 20 centimes du litre, alors que le coût de production est de 42 centimes. ![]() |
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Mise à jour le Vendredi, 24 Avril 2009 06:37 |