Cherchez la femme, cherchez la reine !
Écrit par Viviane Bourdon   
Samedi, 14 Mai 2011 19:39

N’en déplaise aux sieurs Daudet ( pour le texte ) et Bizet ( pour la musique ), l’Arlésienne du Comité de Jumelage Verviers-Arles est une charmante jeune femme dont, non seulement, on parle mais aussi que l’on voit.

Surtout lorsqu’elle apparaît au balcon de l’Hôtel de ville et que le maire d’Arles la présente en ces termes consacrés : “ Pople d’Arle, veici ta rèino”. Sur la place de la République, le peuple applaudit à tour de bras, le Comité aussi. En ce premier mai 2011, nous sommes tous des Arlésiens.

Arlésiens et plus que quiconque, fiers de l’être car à envier.

Dans quelques instants, la XXIe Reine d’Arles, Astrid Giraud fraîchement élue, nous recevra en audience sous les lambris de la Salle du Conseil. Cet honneur et aussi ce privilège nous ont été accordés sur la recommandation du Président de la Commission des Fêtes à la prière de l’autre présidente, Anne Rabet.
Pour dire vrai, en dehors des officiels, des jeunes filles et leur famille, peu d’Arlésiens sont conviés dans la place.
Si elle est jeune, jolie, célibataire, d’une suprême élégance dans sa robe de soie, de moire ou de taffetas, ornée de précieuses dentelles, la Reine d’Arles n’a rien d’une Miss, fusse-t-elle de France.

 

Pour trois ans, elle devient la représentante officielle de la langue, des coutumes et traditions provençales. En cette ambassadrice de charme et en ses demoiselles, candidates malheureuses au titre, s’incarne l’identité arlésienne.


Ces jeunes filles exercent un rôle public et nulle manifestation de quelque envergure ne peut se dérouler sans être rehaussée de leur présence. Elles prennent le pas sur tous les politiques. Leur tâche est redoutable, épuisante, totalement honorifique. Menée en parallèle avec souvent de hautes études - Astrid est en faculté de droit -, elle réclame de toutes ces belles un énorme engagement  personnel et de leurs familles les moyens d’y satisfaire. Car la garde-robe de la Reine et de ses accortes suivantes exige, aujourd’hui plus qu’hier, un lourd investissement.

Leur paraître en grands atours obéit à des canons bien précis. Le prix des accessoires à leur toilette a flambé alors que le nombre d’artisans capables de les fournir s’est raréfié. De leur côté, les pièces anciennes sont de plus en plus difficiles à dénicher. En  toute Arlésienne sommeille dès lors une collectionneuse de parures et de tissus d’antan. De ceux que l’on se transmet de génération en génération mais que l’âge fragilise.


Pour s’en assurer, il suffisait ce week-end-là de quitter le Club des Jumelages, notre quartier général, de traverser la place de la République, de pénétrer enfin sous les voûtes de l’église Ste Anne où se tenait une extraordinaire exposition consacrée au costume porté au XVIIIe siècle en Arles par le beau sexe. Un pur ravissement et aussi un étonnement devant la richesse et la fraîcheur des couleurs, des broderies, des dentelles, des coiffes ainsi que des imprimés venus des Indes avant qu’on ne les confectionne en Provence.

 

 

Le XVIIIe siècle y est au niveau de la mode féminine un siècle riant et chatoyant avant qu’il ne se termine de sanglante façon. L’habit que l’on revêt alors, est le reflet de l’époque, du rang social et du goût personnel. Il est capital pour comprendre l’évolution du froufrou, du falbala vers une ligne, une habitude de “porter”, bref une silhouette que les oeuvres du peintre Léo Lelée vont populariser  au début du XXe siècle.


Mistral et ses collègues du Félibrige en élisant quant à eux une reine étaient des précurseurs. C’était en 1887 un trait de génie car bien mieux que ces sept doctes messieurs,  une jolie femme pouvait propager l’idée du retour à la tradition du pays d’Oc, à une langue renouant après une longue éclipse avec des auteurs et donc avec une littérature.


Fin mars 1930, Mistral aurait eu cent ans. Pour l’honorer, Arles décida à son tour de se choisir une Reine dont la tenue d’apparat est celle de ce temps passé et qui  n’est en rien du folklore.  
Astrid prendra officiellement la tête du royaume d’Arles le 6 juillet prochain. La passation de pouvoirs aura lieu au Théâtre antique lors de la Fête du Costume, somptueux défilé de robes chatoyantes dans les rues d’Arles. Et soudain, il me prend comme un regret. Pourquoi Mistral a-t-il réussi en Provence là où en Wallonie, des hommes comme le Disonnais Adolphe Hardy qui correspondit avec Mistral et bien d’autres échouèrent  dans leur défense du wallon en tant que langue écrite et parlée ?
M’est avis...mais c’est là mon humble avis qu’il faudrait chercher la femme. Chercher la Reine. Chercher le Costume et tout ce qu’il symbolise. Seront-ils présents l’an prochain lors du 45e anniversaire de notre jumelage ? Qui vivre, verra...


Après moultes aventures, partis à dix, notre comité est rentré à onze n’ayant que d’yeux pour une autre Arlésienne.

Pour tout dire, nous ramenions avec nous Jeanne Calment. Enfin son portrait tel qu’il a été brossé par notre concitoyen Charles Leuther. Ce dernier mort en 1999, deux ans après Jeanne, avait été fort impressionné par cette rencontre. Jeanne n’avait-elle pas croisé dans la magasin de couleurs paternel, un peintre quelque peu miteux : Vincent Van Gogh ? La photo du portrait qu’il lui dédicaça, figurait en bonne place dans son salon. Il avait été remarqué par le peintre Lucien Klinkenberg et jugé par lui indispensable à la rétrospective que le Musée Renier consacre à l’artiste défunt.


Jeanne était née en 1875. Ce que certifient les registres de l’État civil et en fait la doyenne de l’humanité. En Arles, l’existence de ce portrait brossé à coups d’aplats de couleurs bien de la palette de son auteur, est totalement ignorée. Sa remise à notre présidente Yvonne Giet-Lebeau par M Alain Salenc, administrateur de la Maison de retraite du Lac où Jeanne termina ses jours, relève du miracle ou du conte de Noël.
Il était une fois et tout de s’enchaîner...


Grâce soit rendue à la divine providence qui permit à Mme Deblanc, conservateur du Musée Renier, de mettre la main sur l’oeuvre au figuré, de demander et d’obtenir toutes les autorisations nécessaires au prêt en un temps record et enfin d’avoir sous la main un Comité qui justement s’en allait musarder par là.
Qui a dit que les jumelages étaient devenus obsolètes ?

“Charles Leuther-Rétrospective”
Musée des Beaux-Arts et de la Céramique, rue Renier 17, Verviers
Du 22 mai au 3 juillet O87/33.16.95
Vernissage le samedi 21 mai à 17 h

 

Mise à jour le Mercredi, 25 Mai 2011 05:45