Janvier 2014, le 27ème journal de Loreta
Écrit par Loreta Mander   
Samedi, 01 Février 2014 07:16

Loreta, nous partage sans fausse pudeur, avec simplicité, coeur et passion, son carnet de bord, celui d'une femme sur le chemin, là où la montagne se dresse.
Son 27ème volet est comme toujours touchant ou bouleversant,... comme les autres lettres qui ont précédé ! 

Comme un cri, elle nous disait : "Il ne faut pas attendre le pire pour s'arrêter et réfléchir un peu à soi. Je ne suis pas plus forte qu’une autre, mais une espèce d’instinct animal me pousse à me battre de plus en plus hargneusement et ça je ne peux l’expliquer. Lors de son premier échange Loreta se présentait ainsi : "La maladie est pour moi une forme de chance, comme un rappel à la vie".

Dimanche 5 janvier 2014

Les fêtes sont passées. C’est fait.

Une nouvelle année commence avec son cortège de bonnes résolutions. Je n’en aurai qu’une pour 2014….. Vivre intensément ! Recouvrer la santé tant que faire se peut en appliquant la règle du vivre intensément le moment présent. Ca ne devrait pas être bien compliqué si je garde la foi en moi et ma capacité de continuer le combat. Vivre, un mot simple, facile à écrire mais tellement difficile à garder debout. Le corps médical me promet que la petite intervention au pancréas du 16 janvier prochain devrait me faire oublier ce petit travers de transit. Mouais…. Je ne demande qu’à y croire. Anyway, le régime restera d’application jusqu’à la fin, donc de ce côté, je n’ai rien à y gagner. Par contre, les risques de pancréatite aigüe pourraient être moindres. Comme d’habitude, je ne peux que leur faire confiance.

Un début d’année permet de faire le point. Les amis qui sont partis, ceux qui sont encore là, mais pour lesquels on n’a plus aucune importance, les nouveaux amis, les familles qui s’agrandissent, les destins qui se lient, les maladies qui arrivent ou disparaissent, …… Le plus difficile pour moi reste quand même les amis qui m’ont déçue, soit en n’étant pas ce que je pensais qu’ils soient, soit parce qu’ils ont tourné les talons, balayant d’un revers toutes les belles choses que nous avons vécu ensemble. Mais je ne regrette rien, c’est leur choix. Je ne m’y fais quand même pas, mais c’est ainsi.

Avec janvier, arrivent les soldes. C’est une coutume à laquelle je participe même si je n’ai pas besoin de grand chose. J’aime regarder les gens qui s’étripent autour d’un présentoir pour faire LA bonne affaire, qu’on range dans sa garde-robe et qu’on se demande, quelques semaines plus tard, ce qu’on a bien pu lui trouver. Il y a même une marque qui a fait un buzz marketing assez étrange : les 100 premières personnes qui arrivent en sous-vêtements, repartiront avec deux articles à prix renversant ! Mazette. Si il faut se mettre quasi à poil pour pouvoir porter l’uniforme de la marque, non merci. Bien que ceux qui y ont participé, n’avaient pas l’air trop malheureux, je me dis qu’ils ne font de mal à personne. En regardant le reportage sur ce qu’ils appellent un « événement », j’ai cru voir les files devant les boulangeries en temps de guerre pour avoir son ticket de pain. Là, c’était par nécessité. Mais, dans le cas présent, franchement, j’ai encore plus de doutes sur la capacité de discernement de certaines personnes. En 2015, ça sera quoi ? Les 5 premiers qui entrent dans la boutique de la pomme avec une plume dans le c… recevront l’i-phone dernière génération ? Je suis certaine que certains le feront. Que ne ferait-on pas pour rentrer dans le rang ? Je me dis aussi que le ridicule ne tue pas et que si ça les rend heureux, pourquoi pas ? Mais je n’adhère pas du tout. Les gens aiment se distinguer et crier haut et fort « j’y étais, je l’ai fait ». Comme si c’était un défi dont leur vie dépend. Les mêmes ne bougeraient pas le petit doigt pour venir en aide à une personne qui se ferait agresser, j’en suis certaine. Mais, au moins, ils ont la conscience tranquille, ils ont leur uniforme et pourront donner l’illusion qu’ils portent des fringues trendy et chers. Si ça les rend heureux…..

On a également été faire un petit coucou chez mon fils, dans sa nouvelle maison. Je suis hyper contente pour lui d’avoir enfin trouvé le nid pour se poser. Un super endroit à la campagne où il va pouvoir s’éclater à biner, planter et prendre du bon temps.

On a fait la connaissance d’un bébé tout mignon, qui vient de pointer le bout de son petit nez chez des amis. J’avais oublié à quel point c’était petit.

J’ai quand même bien commencé l’année. J’ai toujours eu beaucoup de chance dans mes achats divers. Quand j’achète un électro-ménager, par exemple, que je prends du temps à choisir ma boîte en tête de banc du magasin, tu peux être certain que c’est LA boîte. C’est-à-dire celle où il manque le câble ou la petite pièce qui fait que le tout fonctionne. J’ai remis le couvert. J’ai changé ma machine à café. Elle a fonctionné 2 jours et voilà qu’elle ne chauffe plus l’eau. Ben tiens !

J’ai aussi commandé en août dernier des chaises sur internet. Voici des mois que j’attends et rien ne vient, mais j’ai payé bien entendu. Par curiosité, j’ai tapé le nom du site pour voir si on en parlait. Et bien voilà, j’ai la réponse. On est des milliers à s’être fait arnaquer. Ca c’est fait aussi. Ai reçu 4 tasses commandées par internet… toutes ébréchées (mais eux ils remboursent). Comment est-ce possible d’être aussi biesse !

Et maintenant, l’année prend son pas de sénateur pratiquement sous le soleil et quelques 10 degrés, température hors-norme pour l’hiver, mais j’apprécie beaucoup. Encore quelques dodos et c’est le printemps. Toute la nature va éclore et la douceur va reprendre sa place….. enfin, j’espère.

Une petite réflexion sur l’optimisme à relire de temps en temps au fil de 2014 : L'optimisme c'est aussi de dire qu'il y a de la tristesse dans la vie, du malheur. Dire que tout va bien, que tout va bien se passer, ce n'est pas de l'optimisme, c'est de la bêtise. » Cédric Klapisch.

Que l'on soit "optimiste" ou "pessimiste", personne n'échappe aux épreuves. C'est ce que nous allons en faire, qui fait toute la différence. Les épreuves sont incontournables. Elles prouvent à quel point on est battant. Elles freinent ceux qui ne croient pas en eux. Les épreuves affinent le comportement, le caractère, la persévérance..."

 

Mardi 7 janvier 2014

Hier, pas de galette des rois. Pas de pancréas, pas de frangipane ! Donc, pas de danger pour les dents, ou ce qu’il en reste. La fêve n’a rien attaqué. J’ai donc privé mon cœur jumeau de galette, na !


Jeudi 9 janvier 2014

Aujourd’hui c’est shopping avec Maud. Comme au bon vieux temps. On se retrouve à Louvain-la-Neuve pour arpenter les boutiques. Pas que j’aie besoin de quoique ce soit, mais juste pour le plaisir d’une bonne rigolade entre nous. Et je n’ai pas été déçue, on a bien rigolé. Elle ne peut pas marcher longtemps à cause de son pied amputé, mais on a fait ça à pas lents. Ce sont toujours des journées inoubliables pour moi quand je peux passer du temps avec les enfants. On se retrouve entre adultes, mais, pour moi, ils restent toujours mes petits. On ne change pas le cœur d’une maman.


Vendredi 10 janvier 2014

Grosse journée préparations culinaires. J’avais envie de passer du temps en cuisine, juste pour le plaisir. J’ai fait des pains, dont un pour la maman de Jean-Marie que nous voyons demain pour ses 89 ans. Elle est juste extraordinaire, elle est ma maman de remplacement. Nous irons au restaurant, elle adore ça. Mais le pain, ça n’est pas son cadeau, c’est juste pour lui faire plaisir. Elle a été très gâtée à Noël. Le tout suivi d’une tarte tatin. Il y a des jours comme ça.

Pour l’anniversaire de mon JM, il a reçu une guitare qui est arrivée aujourd’hui. C’est Janis Duesenberg. Il était comme un gamin à faire du bruit dans le salon. J’adore ces moments. Il a toujours été si présent pour moi, toujours à mes côtés, à souffrir en silence, à me supporter, à me houspiller un peu et surtout à me rendre le sourire et la foi quand le moral tombait dans les chaussettes. Ca vaut bien une guitare, non ? Je ne pourrai jamais lui rendre la pareille, sauf en continuant à me battre.

 

 

Lundi 13 janvier 2014

Samedi, nous avons fêté, avec quelques jours d’avance, les anniversaires de JM et de sa maman, ma maman de cœur. Une chouette petite bonne femme qui va souffler ses 89 bougies et qui reste fraîche comme un gardon. Bien sûr, elle a une pile cardiaque et une hanche en prothèse, mais ça ne l’empêche pas de rester si jeune et si gentille. Je l’adore. Elle a mangé comme 4, bu un bon verre de vin et a même accepté le pousse-café offert par le patron.

Ce matin, en route pour l’hôpital. Rendez-vous à 9h30. Ce qui est censé durer 1 heure à tout casser m’a pris la journée. Pffff…. Infirmières absentes pour maladie ou embouteillage sur la route, panne du système informatique et tout cela cumulé, ça donne une journée à s’emmerder. Par contre, les nouveaux locaux sont terminés. Tout est propret, net, fraîchement peint avec du nouveau mobilier et une nouvelle technique d’accueil. Un labyrinthe où chacun cherche le café, l’eau et les toilettes. Mais les changements d’habitudes sont toujours un peu perturbants. Enfin, rentrée de l’hôpital pour y retourner jeudi prochain avec une nuit 4 étoiles et sommeil garanti. Je suis fatiguée, mais une bonne nuit là-dessus et demain, à nouveau en route pour de nouvelles aventures.


Jeudi 16 janvier 2014

Lever à 5h30 pour être à l’hosto à 8h au plus tard et, bien entendu, à jeun. J’ai déjà faim avant de partir. Hospitalisation pendant 2 jours pour une inspection interne du pancréas et ses voisins, foie et vésicule. C’est à la fois pour essayer de comprendre la raison des pancréatites à répétition et faire le point «  de l’intérieur » sur l’état des métastases ou leur éventuelle propagation au pancréas. J’avoue, je flippe énormément. Tout d’abord, parce que j’ai une phobie des anesthésies et, ensuite, des résultats négatifs éventuels. Hier, une des rares fois où j’ai craqué, mais vraiment craqué. J’ai beaucoup pleuré. En fait, j’avais la rage et le ras-le-bol de l’hôpital. J’étais également persuadée que je ne me réveillerais pas de l’anesthésie générale. Toutes les idées les plus noires et les plus saugrenues me sont passées par la tête. Alors que j’écris de si beaux préceptes que je m’empresse d’appliquer jour après jour, là, je suis anéantie. C’est un sentiment très particulier, accompagnée de la rage contre la maladie et contre mon moral qui ne me soutient plus. Heureusement, mon cœur jumeau m’a été d’un grand secours. Il m’a conscientisé sur la « chance » que j’avais dans mon parcours. Ce matin, tout s’était estompé, j’avais retrouvé le moral et j’y suis allée franc battant.

On m’installe dans la chambre. Plus de chambre particulière, donc je partage avec une vieille dame qui y est depuis plus de deux semaines. Pourquoi on me met toujours avec des vieilles dames ? Elles sont sympas, mais bavardes et moi, je n’ai aucune envie de parler. De plus, elle vient de Blankenberghe et je ne comprends absolument rien à ce qu’elle me dit. Donc, j’acquiesce bêtement à ses dires sans savoir si elle attend une réponse ou non et puis je me jette sur mon mot croisé d’un air très concentré. Mais elle m’a quand même fait rire quelques fois. JM était avec moi et essayais de l’aider tant que faire se peut. Sortir de son lit lui prenait environ 10 minutes avec des élans ratés, tu ajoutes 10 minutes pour trottiner jusqu’au fauteuil et 5 minutes pour s’affaler dedans… et là, je te le donne en mille, un médecin entre et lui demande de se coucher dans son lit pour une auscultation. Et re-belote, chemin inverse avec les mêmes difficultés. Un peu comme dans la scène de l’escalier du sketch de Mr Bean. Et tout ça, 3 fois d’affilée. On se contente de peu quand même et ça n’est pas bien de se moquer, mais c’était juste drôle …. Sauf pour elle !

9h30…. En route sur la chaise roulante pour une échographie du cœur. J’adore le regard plein de compassion des visiteurs de l’hôpital quand ils te voient passer dans ton buggy ! « Pauvre femme » se lit sur leurs fronts. Si ils savaient que je suis loin d’être une pauvre femme ! Tout est normal pour le cœur, c’est déjà ça. Retour à la chambre où je dois m’affubler de la superbe camisole vert triste bien échancrée à l’arrière où, au moindre geste, tu montre ton derrière à toute la planète. J’ai toujours aussi faim. Je vois passer les plats, mais rien pour moi. Je passe l’examen à 15h. Si j’avais su, je me serais empiffrée d’un super petit-déj. Je recommence à flipper, mais c’est le moment, c’est l’instant, roulez jeunesse et hop sur la table d’examen. Je suis entourée de 4 ou 5 filles coiffées d’un bonnet de boucher et d’un tablier anti-émeute. Au milieu d’elles, une jolie petite blonde qui semble avoir 15 ans, super jolie qui m’envoie, via un masque, dans les bras de Morphée. Ensuite, c’est le trou noir de chez noir, juste une voix qui me demande de me réveiller. T’en as de bonnes toi, je suis complètement dans le gaz mais je lui demande d’une voix lente si je n’ai pas dit de conneries pendant mon sommeil. Ce qui la fait beaucoup rire. Bienvenue dans le monde des vivants. J’ai juste envie d’embrasser tout le monde, mais mes bras pèsent environ une tonne. Je lui fais juste un clin d’œil comme je peux. Retour près de mon cœur jumeau dans la chambre qui, tout à coup, me regarde avec ces yeux que je connais si bien et qui me disent « je t’aime ». Je crève de mal à la gorge, comme une angine, à cause du cathéter utilisé pendant l’examen. J’émerge tout doucement, mais j’ai toujours aussi faim. Ce qui, en soit, est plutôt bon signe. Ca veut dire que mes fonctions primaires reprennent le dessus. Le médecin arrive pour me donner les résultats. Mazette, je suis contente, que des bonnes nouvelles. Pas de métastases au pancréas, celles du foie ne sont que des vieilles cicatrices et pas besoin de poser de stent. Ben voilà, tout ça pour ça.

Je n’ai jamais aussi bien dormi. Vers 22h, je bois un peu d’eau qui me fait un bien fou et je savoure un yaourt aux fraises. Il faut y aller pas à pas pour voir si la digestion reprends bien son cours. Ensuite, j’ai envie d’une clope. Je sais, ça n’est pas bien, mais j’ai envie. Si vous m’aviez croisé dans les couloirs qui mènent de la chambre à la sortie, vous m’auriez certainement donné une petite pièce. Je n’ai pas encore le réflexe du selfie, mais ça en aurait valu la peine. Un pantalon de pyjama, la jolie chemise de nuit échancrée et sexy, un gilet, un anorak et une écharpe. Un peu d’air me fait du bien. Ma voisine de chambre avait fermé les rideaux et la porte, j’étouffe avec l’impression de baigner dans un bouillon de microbes. J’attends qu’elle ronfle pour rouvrir tout cela et enfin m’endormir du sommeil du juste.

 

 

Vendredi 17 janvier 2014

Deux heures du matin. Alors que je dormais comme un bébé, les lumières s’allument dans la chambre. L’infirmière, la bouche en cœur, vient prendre la tension et la température. Tu parles d’une discrétion. Je n’aime pas beaucoup ça. Je me rendors et re-belote à 5h45. Elles doivent faire leur boulot, d’accord, mais un peu de douceur ferait du bien. A 7h, petit-déjeûner. Miam. Ah que nenni. D’un air militaire, l’infirmière me somme de ne pas y toucher avant la prise de sang, qui, bien entendu, a lieu 1 heure plus tard. Je regarde le plateau avec ses 2 tartines au sirop de liège et le café qui refroidit. De toute façon, ils appellent cela du café, mais ça tient plus de la tasse d’eau chaude dans laquelle un mammouth aurait trempé l’orteil. Pufff que c’est mauvais. Je me lave et m’habille avec le dentier de ma voisine de chambre qui me sourit, seul, posé sur l’étagère. J’aurais vraiment tout fait ! Effectivement, en regardant ma voisine de chambre, je me rends compte qu’il lui manque quelque chose dans la bouche et je souris intérieurement. Le médecin me donne le feu vert pour rentrer à la maison et je demande à JM de venir vite, très vite car je serai mieux chez moi. 17 janvier, c’est l’anniversaire de Mamour. Tout est bien qui finit bien.

J’espère juste que maintenant ils vont me foutre la paix avec tous leurs contrôles et autres joyeusetés médicales. Prochaine herceptine le 3 février et prochains contrôles dans 9 semaines. D’ici là, on va en profiter pleinement.

En partant hier à l’hôpital, on a croisé des hordes de voitures bloquées dans les embouteillages. Tous ces gens vont travailler et il m’est venu une envie d’écrire un petit texte sur la vie, ou ce que j’en ai compris après 60 ans de promiscuité dans cet univers.

Au départ, tu es un spermatozoïde, tranquille. On te crie que tu dois être le meilleur et arriver le premier à l’ovule qui t’attend. Nous sommes des milliers et il n’y aura qu’un élu. Et c’est toi. A partir de là, toute ta vie, tu devras subir et prouver que tu es le meilleur. Après une gestation bien au chaud dans le ventre de ta mère, tu pointes le bout de ton nez. Tu n’as rien demandé à personne. Tu ne choisis pas où tu vas, ni le lieu, ni le moment, ni ceux qui t’accueillent. Pouf pouf pouf, j’arrive. On me donne un prénom pour me reconnaître parmi les autres. Celui-là non plus, je n’ai pas le droit de le choisir mais il sera ma plaque d’identification toute ma vie.

Mais c’est quoi une vie ? Alors là, on ne sait pas trop bien, on suit et on ne sait pas pendant combien de temps, ni vraiment comment. On t’apprend à parler une langue, un code que tu ne choisis pas. Contrairement aux animaux qui, après quelques heures, sont déjà debout, toi tu restes couchés pendant quelques mois, passant d’un bras à l’autre et au berceau. On t’apprend donc à te relever et à marcher. Il en faut de la patience pour t’enseigner tout cela, surtout qu’il n’y a pas de normes, tu fais au mieux mais le plus rapidement possible. Là aussi, tu dois être le meilleur, le génie qui fait tout plus vite et mieux que les autres. Et dès que tu es prêt, c’est-à-dire que tu te tiens debout, tu marches, tu parles et tu ne fais plus caca ni pipi dans ton lange, tu peux y aller.

De la crèche à l’université, ton chemin est tracé. Tu te lèves tôt le matin, on te conduit en voiture ou en bus dans une pièce, où tu retrouves des congénères de ton âge pour y passer la journée sous les ordres d’un chef qu’il soit puéricultrice, instituteur ou prof, tu vas devoir t’appliquer à apprendre. Mais tout le contraire de ce que tu as appris jusqu’à présent : ne pas parler, ne plus bouger et te retenir d’aller aux toilettes. Il faudrait savoir, un jour blanc, un jour noir. Savent-ils ce qu’ils veulent ? Eux, oui. Toi, non. Ils te préparent à la vie adulte qu’ils disent. Mais c’est quoi la vie d’un adulte ? Ben, ça n’est pas très différent de ce que tu as connu. Le matin, tu te lèves tôt, tu manges tout seul, tu vas tout seul aux toilettes, tu te laves tout seul. Jusque là c’est pareil.

Mais, comme tu es un adulte, tu as des responsabilités. Tu réveilles les enfants, tu les conduis à l’école et puis tu vas travailler. Travailler ? kezaco ? Pour faire simple, tu es dans une voiture, coincée entre des milliers d’autres, tu t’emmerdes à attendre. Attendre quoi bon dieu ? Tu te diriges vers un bâtiment, où tu tournes pendant ½ heure pour trouver une place pour ton auto, tu rentres dans une pièce où tu rencontres des congénères qui, comme toi, se sont emmerdés pendant des heures dans leur auto, tu as un chef qui te dis ce que tu dois faire aujourd’hui et à 18h, tu fais la même chose, mais en sens inverse. Après environ 40 années de jours qui se ressemblent, on te dit que tu es trop vieux et que l’état va te verser une aumône pour rester chez toi à attendre que ta vie s’arrête.

Et ben, dis donc, si c’est ça la vie. Moi, je ne la voyais pas comme ça. Moi, je la voyais dans un endroit que j’aurais choisi, portant un prénom qui me plaise, à faire les choses que j’aime, à mon rythme et où je veux. Non, mon vieux, ils t’ont coincé au départ et dès ce moment, tu n’as qu’à suivre, sinon….. hors des rangs.

Pas d’auto, pas de maison, pas de luxe, juste toi et toi. Mais, finalement, n’aurais-je pas été plus heureux si j’avais fait ce que j’avais envie ? Plutôt que d’aller m’enquiquiner dans un bureau avec des gens pas toujours très agréables, à faire un boulot dont tu n’as rien à faire pour un chef qui te considère comme un maillon de sa chaîne, qu’il détachera dès qu’il n’en aura plus besoin, j’aurais dû suivre mes envies. Je n’ai aucun regret, mais avec le recul, et dans ma situation médicale, je me dis que j’aurais fait plein de choses autrement si j’avais su que c’était pour en arriver là. Et je suis obligée de continuer à me battre, mais pour sauver ma peau parce qu’après tout, la vie vaut vraiment la peine d’être vécue pleinement, même si parfois c’est une vraie chienne.

Le loisir que j’ai aujourd’hui c’est de pouvoir choisir les gens avec lesquels je me sens bien, de faire ce que j’ai envie au moment où j’en ai envie et de n’avoir plus de compte à rendre, sauf à moi-même. Mais ceci est juste une pensée qui m’a traversé l’esprit.

 

 

Lundi 20 janvier 2014

Je me sens de mieux en mieux. Sont-ce peut-être les bons résultats de la semaine dernière ? Ou le soleil qui a brillé jusqu’à hier (oui, parce qu’aujourd’hui, il fait cradingue, c’est sûr la mousson vient de commencer !). Quel chouette week-end qui vient de se terminer.

Comme dit la chanson « on n’a pas tous les jours xx ans, lalalalalala…… « , je dis ça pour mon cœur jumeau. Samedi, quelques amis sont venus à la maison et, réunis autour d’un bon vin, du fromage et de la charcuterie, on a bien rigolé. On a fait un peu de musique… c’est ça aussi le bonheur. La joie de rencontrer des amis qui sont tellement vrais, qui ont été là, qu’ils en deviennent presque membres de la famille. Merci Michel, Marjo, Christian, Joëlle, Christine et Pierre. Merci simplement d’être là ! Mais se coucher à 3 heures du matin, ça relève de l’exploit pour moi, surtout le réveil du lendemain. Je n’ai décidément plus l’âge, sans compter que le vin, je l’ai vu, c’est tout. Pour me rassurer, je dis que je n’aime pas, comme ça pas de regret.

Aujourd’hui, je suis encore en phase de récupération. Toutes ces petites pierres de bonheur semées au gré de mon chemin, construisent mon avenir…


Jeudi 23 janvier 2014

RAS, enfin presque. Je me retape bien et la fatigue commence à passer son chemin. Mais, comme si le bien-être total ne devait pas faire partie de moi, depuis 2 jours, j’ai la joue gonflée (une chique comme on dit en Belgique)…. Inflammation de la gencive. Tous ces traitements ont eu raison de mes jolies quenottes. J’ai dû interrompre tout soin pendant les chimios et ça n’arrange rien. Mes dents se brisent comme du verre. J’ai appris à manger en alternance d’un côté à l’autre. Mais une molaire récalcitrante du côté droit a laissé tomber les armes, ce qui provoque de l’infection. Mon rendez-vous chez le dentiste est le 10 février. En attendant, je fais avec à coup de bains de bouche et d’anti-inflammatoires. Nondidju que c’est barbant tout cela. On prépare nos sacs pour une petite visite éclair à Wissant avec des amis que nous aimons beaucoup. 3 jours face à la mer, mmmhhhhh que du bonheur !

 

 

Dimanche 26 janvier 2014

Nous rentrons de trois jours passé à Wissant en Côte d’Opale. Pour fêter les anniversaires de nos hommes, mon cœur jumeau et Christian notre ami, nous avons décidé de larguer les amarres le temps d’un week-end …. Et nous n’avons pas été déçus. Vendredi, un beau soleil, pas de vent, mais surtout un coucher de soleil tout d’or vêtu. Merci la nature pour ce fabuleux spectacle. Il y a eu aussi la mini-tornade du samedi soir (non pas la fièvre, mais c’est tout comme). Du vent à plus de 140 km/h et des éclairs plein le ciel. A croire qu’il y avait ouverture pour les soldes là-haut. Ca éclairait dans tous les coins. Ca donne une ambiance un peu apocalyptique. Et, bien entendu, coupure de courant pendant une paire d’heures à l’hôtel. Le noir le plus complet dès 19 heures. Quelle aventure !

Puis nous avons croisé des bancs de phoques qui se prélassaient au bord de l’eau. Pour la première fois de ma vie, j’ai vu des phoques en liberté. Des petits points noirs qui émergeaient de l’eau et qui faisaient des petits bonds de temps en temps. C’est là que je remarque que j’ai gardé mon âme d’enfant, parce que ce genre de spectacle m’émeut, tout simplement. Me déconnecter quelques heures pour retrouver les sons et la lumière de la nature me rendent heureuse en plein dans le moment présent. Savourer ces instants, encadrée d’amis fidèles, simples et sincères, que demander de plus ?

Je suis bien.

Vendredi 31 janvier 2014

Dernier jour de la semaine, dernier jour du mois et en voilà un de passé en 2014. Dieu que le temps passe vite. Hier, Jingle Bells tintait dans tous les coins et aujourd’hui on pense à faire sauter les crêpes. Ca s’appelle le fil de la vie.

Hier j’ai essayé de faire des mug-cakes. Vous savez ces petits cakes cuits dans la tasse au micro-ondes. Le résultat ? Spontex ou gratounette pourrait me donner la réponse, ça ressemblait à une éponge. Et bien, c’est pas bon (ou alors j’ai loupé une étape). Comme pour tout, la cuisine demande du temps et de l’amour. Le mug-cake est à la cuisine ce que le Mc Do est à Robuchon. La bonne cuisine prend du temps. Il faut prendre le temps de choisir les ingrédients, les peser savamment, les amalgamer, prendre le temps de les dorer et de les cuire. Je ne suis définitivement pas de l’époque du vite-fait, bien (ou mal) fait. La vie, c’est pareil. Si tu fais les choses vite, sans réfléchir, sans choisir, sans peser le pour et le contre, tu auras le résultat que tu mérites.

Février arrive et ça sera un mois d’anniversaires, bons et mauvais, mais vous le découvrirez dans la prochaine édition.

En tout cas, amis lecteurs, j’espère que ces quelques tranches de vie vous auront permis de sourire, de vous poser des questions ou tout simplement de passer un bon moment avec moi. J’écris comme je parle, de tout et de rien. La maladie m’accompagne mais en toile de fond. Elle n’est plus ma priorité, je la guette et je lui saute dessus dès qu’elle veut prendre les rènes et ainsi ira ma vie.

Mise à jour le Samedi, 01 Février 2014 07:32