Arrivée de Américains à Verviers septembre 1944
Écrit par Best of Verviers   
Mercredi, 05 Septembre 1945 16:48
 

"Un autre groupe de la 1ière armée franchissait la frontière belge le 12 septembre près de la petite cité de Rötgen (nord-est de Verviers). Les habitants s'étaient enfuis dans les bois. Deux jours plus tard, ils commençaient à rentrer conduits par le seul policier de Rötgen.

Ils étaient plongés dans une sorte apathie, tellement rapide et inattendue avait été l'avance des blindés à travers la Belgique.
Nous nous étions arrêtés le soir avant Verviers. Là, les Américains avaient reçu la plus folle réception de toute la guerre. Ils avaient été recouverts de fleurs et de fruits, leurs uniformes imprégnés de vin, leur figure marquée de rouge à lèvres par les baisers de milliers de femmes délirantes de joie. C'était le point culminant de notre passage en Belgique"

Geographic Magazine juillet 1945  Confidences d'un soldat américain un an après la Libération dans notre région.

 

Mes souvenirs de 1944

"Pendant la guerre à Verviers, les Allemands occupaient le Palais de Justice. Les soldats patrouillaient dans les rues.
En 1944, on bombardait sur l'Allemagne, les avions passaient toutes les nuits au-dessus de nous!
Enfin les Américains sont arrivés, on a vu les premiers Honks (canons) par l'avenue de Spa venant de Heusy.
Les gens étaient sur les seuils pour les accueillir. Les maisons étaient garnies de banderoles et de drapeaux.
Les soldats américains distribuaient de la nourriture (chocolats,oranges et biscuits) aux habitants qui avaient été privés pendant 4 longues années.
Les Allemands ont été repoussés vers Stembert, où ils se battaient encore plus loin et les avions alliés  faisaient la chasse aux Allemands.
Cela a duré de juin à décembre (1944) quand il y a eu une grande offensive à Bastogne où les Allemands étaient revenus. La bataille a été gagnée par les alliés et ce fut la vraie libération. LA JOIE!!!

Interview dont les questions ont été posées par Justine Amand 11 ans et les réponses par Berth Douffet!

 

 

 

Souvenirs d'enfance de Verviers d'un économiste Américain

"Le 16 Décembre 1944, L'Allemagne Nazie lança sa dernière offensive pendant la seconde guerre. Je fus témoin de ce qui par après en anglais fut appelé : Battle of the Bulge,"et parmi les gens de Verviers, soit "L'offensive Von Runstedt" ou encore "La Bataille Des Ardennes." Pour ceux des lecteurs ici qui furent soit trop jeune ou pas né, je vous conseille de lire des livres là dessus, notamment celui de Heagy, en ce temps un journaliste renommé du journal "Le Jour": "Lorsque L'Offensive Von Runstedt menaçait Verviers." Ce n'est que le 19 Décembre 1944 que mes parents et moi , ainsi que les autres habitants de Verviers, apprirent que les Allemands avaient fait une contre offensive, Verviers avait été libéré le 9 Septembre 1944 et on ne se doutait pas que les armées allemandes en déroute essayeraient de revenir. Mais tout à coup sur les hauteurs de Verviers, où nous habitions à l'époque à la bouquette à Heusy , on entendit des canonnades dans la distance. Et tout a coup, je vis des camions et des camions de militaires de l'armée Américaine , pleins de soldats noirs avec fusils armés avec des bayonnettes pressés l'un contre l'autre, s'en allant vers le front (Historiquement, c'était pour la première fois que des soldats noirs Américains pendant la seconde guerre mondiale s'étaient portés volontaires pour combat, répondant à l'appel du Général Eisenhower). Après avoir entendu la nouvelle de cette contre -attaque , ma famille et moi, dans la neige, allâmes à pied de Verviers jusque Liège ou vivaient des amis de mes parents. Là , on passa deux semaines, dans la cave , car les fusées V1 et V2 tirés de l Allemagne inévitablement tombaient et tuèrent beaucoup de gens. En fait, un camion plein de soldats Américains fut atteint vers Pepinster par une de ces fusées qui tuèrent tous les soldats à bord. Beaucoup de gens de Verviers et environs craignant le retour des Nazis également comme nous, s'enfuirent et je me rappelle vivacément que les routes avaient été, avec nous, plein de gens . Il y avait des rumeurs de soldats allemands habillés avec des uniformes Américains. Finalement, on entendait que des Allemands avaient exterminés les prisonniers américains qu'ils avaient capturé près de Malmédy. D'autres civils , femmes et enfants y compris, furent assassinés par les SS revanchards. Bastogne était encerclé. Mais L'Armée Américaine résista courageusement . On connaît le reste. Le cimetière Américain de Henri Chapelle contient les restes des nombreux soldats Américains qui ont sauvé Verviers et la Belgique en Décembre 1944. Recueillons nous en gratitude. Moi-même, éventuellement, moins de 10 ans après revint en Belgique portant le même uniforme que ceux qui donnèrent leurs vies pour que vous, lecteurs de ce site , puissiez vivre en liberté. N'oublions pas , même 62 ans après! La liberté à un prix. Joyeux Noel et Bonne Année de Washington, DC, USA,"

Freddy Kahn Décembre 2006

 

La libération me surprend

Fin août l944, je possédais, depuis quelques mois, un vélo (une bicyclette, comme disait ma grand'mère...) fort convenable que mon père avait acheté d'occasion. Il était solide, et son cadre émaillé noir à filets dorés avait un aspect neuf. Mieux, grâce aux multiples informations en tous genres que l'on recueillait en ces temps troublés, on avait réussi à le doter de deux pneus "rechapés", c'est-à-dire parfaitement regarnis de gomme, luxe considérable pour l'époque. C'est avec cet engin dont j'étais très satisfait que, au moins deux fois par semaine, j'effectuais ma corvée "lait". Il s'agissait d'aller chercher trois litres du précieux liquide à la ferme Franquet, située en lieu-dit "Trou du Chat", à Bruyères-Battice.

Ce jour-là, 4 septembre l944, alors que je débouchais de la ruelle du "Trou du Chat" sur la route de Bruyères, main gauche au guidon de ma bécane, cruche dans la main droite, l'esprit parfaitement tranquille, je tombai pile sur une troupe allemande cheminant sans doute aussi, comme tant d'autres,...aus Paris. Certains soldats marchaient, d'autres chevauchaient un vélo bardé d'équipements militaires et d'objets hétéroclites. Je n'eus d'ailleurs guère le loisir d'observer longuement la scène: montant un vélo (manifestement civil...) dont les deux pneus étaient plats, un soldat Boche quitta son groupe et fondit littéralement sur moi !  Et avant même d'avoir réalisé ce qui m'arrivait, casque, masque à gaz, besace, garnissaient déjà ma chère bicyclette dont le bon état avait assurément attiré l'attention du soldat venant de laisser choir dans le fossé de la route, la bécane l’ayant amené jusque là. Et je questionnai prudemment celui qui déjà s’éloignait sur ma propre machine : "Ich darf dieses nehmen ?". (dans cette conjoncture pourtant plutôt émotionnelle, ma passion des langues m'avait, d'une manière quasi instinctive et sans qu'une seconde de réflexion m'eut été nécessaire, fait prononcer cette phrase linguistiquement parfaite !). "Ja !" me lança le soldat ennemi, cependant que ses camarades s'esclaffaient du bon tour qu'il m'avait joué. A coup sûr, je devais en tirer une, de tête; sous le coup de la surprise, je demeurai de longues minutes sans réaction...puis je me mis à examiner mon vélo de remplacement. C'était une vieille machine usée, rouillée, néanmoins pourvue d'un "dérailleur",...lequel dérailleur déraillait sans doute plus souvent que ne le souhaitait l'utilisateur. Je l'enfourchai, histoire de me rendre compte; tout grinçait, tout gémissait, et je sautai aussitôt à bas puisque, pneus crevés, il m'était impossible de rouler ainsi jusqu'à Petit-Rechain. Du coin de la ferme Dellicour, où je stationnais, je voyais la troupe allemande disparaître derrière un coude de la route, dans la côte à l'entrée du hameau de Manaihant; je gage que de là, elle allait piquer droit sur le "Grand Reich", par les ruelles et le village de Chaineux, et le chaussée de Henri-Chapelle.

Je me remis en route, à pied cette fois, car on devine qu'encombré d'une cruche, ce n'était guère commode de conduire à la main, un vélo cahotant "sur les jantes". C'est donc avec un retard notable, et toujours..."lu cawe è cou" que j'atteignis Petit-Rechain. Légitimement inquiet puisque la chaussée de Battice continuait d'écouler presque sans arrêt le reflux des armées allemandes, mon père s'avançait à ma rencontre, au lieu-dit "Pont d'Arcole" (près du château d'eau).  "Qu'est-ce qu'il y a ?" me cria-t-il de loin, surpris de me trouver marchant et l'air bizarre.  "Les Allemands m'ont volé mon vélo !"                   

Le lendemain, je m'en fus à la mairie, afin de déposer plainte pour vol, auprès du garde champêtre Walthère Derouaux. Au moyen de la plaque provinciale de la bécane, ce dernier n'eut aucune peine à en identifier le légitime propriétaire ; c'était un habitant de Soumagne (!) qui, aussitôt prévenu, vint récupérer son bien et me gratifia d'un billet de lOO francs. Ce qui ne me consolait d'ailleurs pas de la perte de mon beau vélo...     

La retraite des armées allemandes se poursuivait; surtout de nuit, pour parer aux attaques aériennes dont la menace et la fréquence augmentaient dans la mesure où la progression des Américains rapprochait les aérodromes et raccourcissait les missions des avions de chasse (Mustang, Thunderbolt, Lightning, etc.).

Des rumeurs circulaient que les Américains étaient à Liège !  On entendait bien quelques détonations dans cette direction, mais comment savoir ?  

Cette nuit-là, une colonne blindée allemande montant de Dison, nous tira, mes parents et moi, de notre premier sommeil, si tant est qu'on puisse désigner ainsi le repos empli d'inquiétude qu'on connaissait depuis des semaines.

En effet, la colonne s'était arrêtée, et les classiques vociférations des gradés avaient succédé au rugissement des moteurs et au grincement des chenilles des tanks.

L'un de ceux-ci, un gigantesque "Kônigstiger" de 7O tonnes, orgueil du peuple allemand, était la cause de tout ce remue-ménage: à travers quelques bribes de conversation perçues par ma mère, il s'avérait qu'une panne empêchait le tank d'avancer... 

Cette nuit-là, c'était celle du jeudi 7 au vendredi 8 septembre l944.  Quand le jour se leva, notre situation était en voie de devenir bientôt dramatique: morceau de choix pour l'aviation de chasse américaine, l'énorme char d'assaut allemand demeurait donc immobilisé tout contre la bordure du trottoir, en plein devant notre maison (rue de Battice à Petit-Rechain), et toutes les tentatives de le remettre en marche restaient vaines; immanquablement, il n'allait pas tarder à être pulvérisé par le "feu du ciel"...et nous avec lui .   Alors, on résolut de faire la seule chose utile: partir. Mon père promit de nous rejoindre sous peu, et c'est donc avec ma mère que, sans pratiquement rien emporter, je gagnai Verviers en tram, pour trouver le gîte et le couvert chez mon grand frère Jojo, y demeurant rue des Minières. Papa arriva dans le courant de l'avant-midi, apportant la nouvelle que "le tank" n'avait pas bougé mais qu'il semblait n'avoir pas encore été repéré par la chasse américaine. On décida néanmoins d'encore profiter un peu de la sécurité relative qu'offrait la ville.  Et puis, dans un sentiment mêlant l'ennui, l'inquiétude, l'incertitude, l'impatience, l'énervement, l'espérance, on attendait "quelque chose"...sans savoir très bien quoi.  Sans deviner, en tout cas, que des temps nouveaux, une journée mémorable, étaient si proches.

Rentrant de son travail (chauffeur de locomotive au Chemin de fer), Jojo raconta ce qu'il savait: les Américains approchaient de Liège, disait-on. Une réalité concrète: le canon tonnait, de plus en plus fort, de plus en plus près.  On s'organisa pour la nuit. Mon frère et ma belle-soeur offrirent leur lit à Papa et Maman. A trois, on se répartit les fauteuils, des coussins, des couvertures; pour une nuit blanche, interminable, parsemée de lueurs, d'échos lointains, de détonations, d'inquiétude et de fols espoirs.   Le matin, des rumeurs locales prédisaient l'arrivée imminente des Américains. Heureuses gens qui "savaient" !  Mais par qui ? Comment ?  N'est-elle pas absurde, ma témérité, de prétendre évoquer, faire revivre pour les générations futures (s'il s'en trouve...), trente-cinq ans après, des moments pareils !??  On était le samedi 9 septembre l944; j'avais l5 ans et 7 mois. Il me tardait de descendre en ville, au centre, pour y prendre "l'atmosphère". Mais, provisoirement, chacun se bornait à tromper son énervement en passant de la salle à manger au balcon, du balcon à la salle à manger, de la salle à manger au balcon.  Dans l'immeuble juste en face, un vieil homme, Adrien HOUGET, P.D.G. et ex-officier, faisait de même; mais en plus, il repassait inlassablement sur un vieux phonographe attiré près de la fenêtre ouverte, la "Marche des Chasseurs Ardennais", son ex-régiment, criait-il. De temps en temps, braquant vers le Nord des jumelles qui me faisaient envie, il communiquait à la cantonnade qu'il voyait quelque chose du côté de Manaihant. Mais quoi ?   Jojo avait réussi, difficilement d'ailleurs, à convaincre mes parents de rester encore un peu à Verviers. On sentait qu'il allait se passer quelque chose, et ce n'était pas le moment de prendre des risques inutiles...  Il y avait bien toujours ce fameux "Königstiger" dont on ne savait toujours pas s'il avait enfin repris sa progression vers le Grand Reich; mais en regard, il y avait aussi la perspective...de retrouver la maison, soit pulvérisée, soit mise au pillage comme en l94O . N'y tenant plus, je décidai de partir aux nouvelles, et je dévalai la rue des Minières.  Le canon tonnait dans la direction de Liège. Parvenu sur la place de la Victoire, je fus frappé de voir de très nombreux passants qui semblaient y circuler à la fois avec et sans but précis...  Il était près de l4 heures à l'horloge de la gare centrale que j'apercevais déjà. Mais l'heure n'était plus aux méditations...

Tout à coup, une immense clameur s'éleva, et, tel un aimant agglutinant la limaille de fer, elle précipita au centre de la chaussée, tout ce que le quartier comptait d'avides badauds: "Les A-mé-ri-cains !".  A cinquante mètres de moi, deux vagues humaines concentriques, jaillies des trottoirs, stoppaient net, submergeaient,  coinçaient comme dans une nasse,juste en regard du confortable abri vitré à la disposition des usagers du tram, "quelque chose" qui avait surgi de la rue d'Ensival: un minuscule véhicule kaki, d'aspect bizarre, flanqué de plusieurs soldats, en kaki eux aussi.  "Ils" étaient là !  Le coeur bondissant d'émotion, je me contentai de cette furtive vision: à quoi  bon, d'ailleurs, insister pour tenter d'en voir davantage, puisque...  je me trouvais ballotté, soulevé, au lOe, au 2Oe rang peut-être !!!   Aussi vite que je pus, je courus annoncer la nouvelle rue des Minières, et presqu'aussitôt, je repris, avec mes parents, le chemin du retour vers Petit-Rechain.


 Les Allemands avaient déguerpi, "Kônigstiger" compris; la maison était intacte et le village grouillait de troupes et de véhicules américains. Depuis plusieurs jours, le temps n'avait pas cessé d'être radieux, avec un beau ciel pur et une température très douce.  L'allégresse semblait générale, sans laisser percer l'angoisse étreignant tous ceux qui, en ces heures étoilées, attendaient l'hypothétique retour d'un prisonnier de guerre, d'un déporté, peut-être d'un prisonnier politique promis au poteau d'exécution.  On voyait circuler de nombreux hommes du village, revêtus d'une combinaison en jute, coiffés d'un bérêt sombre, et porteurs d'un brassard aux couleurs belges ; c’étaient des membres de la Résistance.

Ma curiosité retrouvait à présent de gigantesques possibilités, et, avec mon camarade Laurent BREMEN, dont les parents exploitaient un cabaret à l'angle des rues Dewez et de Dison, je pus m'approcher vraiment de plusieurs soldats américains ayant...le cognac pour objectif militaire immédiat. Parmi eux, à la fois des blancs et...des autres, à la peau allant du beige très clair au brun très foncé. Ma surprise fut d'entendre un de nos libérateurs s'exprimer en français correct mais avec un accent bizarre: c'était un gars originaire de la Louisiane, qui donnait ainsi une leçon d'Histoire appliquée. Face à ces hommes (je les jugeais ainsi, bien que beaucoup n'eussent que l8 ans à peine) dont on était avides de savoir plus, chacun y allait de sa petite tentative de s'exprimer en anglais, ou en quelque chose y ressemblant. Hélas, cette langue était, à l'époque, fort peu connue, très peu étudiée. En ce qui me concerne, j'en avais abordé les premiers rudiments sur les bancs de l'Athénée royal de Verviers, à peine quelques mois plus tôt; d'abord peu enthousiaste pour ce langage que je jugeais étrange, à l'article défini quasi imprononçable (!), la soif de le connaître ne m'était venue qu'avec le débarquement en Normandie; de toute façon beaucoup trop tard pour en avoir acquis une habitude utile à ces journées fastes qu'il m'était donné de vivre.     Toute ma vie, j'allais conserver le sentiment amer d'avoir "manqué le coche" en me trouvant, le 9 septembre l944, incapable de nouer un dialogue privilégié avec le monde anglo-saxon: dans une langue que je n'ai, depuis lors, cessé d'aimer, et de pratiquer avec délectation...

La bataille continuait, le canon tonnait vers l'Allemagne, un hallucinant charroi américain roulait vers l'Est. J’étais persuadé que la paix éternelle accompagnerait toute ma vie.  Illusions de gosse..

Julien HERMAN  né en 1929

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Mise à jour le Vendredi, 05 Septembre 2008 17:42