Pepins made in USA. 12/2009
Écrit par Bernard Lange   
Samedi, 12 Décembre 2009 00:34

 

Douglas Tate n’est pas le premier homme à avoir marché sur la lune mais c’est tout comme ! En effet, il est le premier joueur américain à avoir porté le maillot de Verviers-Pepinster, « Pepinster » tout court à l’époque, c’était en 1973.

L’équipe pepine militait alors en Division 4. Les 207cm du grand Mormon ont rendu muets de stupeur les supporters qui croisèrent sa route pour la première fois. Ces derniers ne pensaient probablement pas que cette première pige historique en appellerait 64 autres. C’est en effet avec pas moins de 65 joueurs arrivés des USA que le RBC Verviers-Pepinster a écrit quelques-unes de ses plus belles pages sportives. 

Dès 1975, le club atteint l’échelon de la Division 3 nationale avant d’accéder dix ans plus tard à la prestigieuse Division 1 au sein de laquelle il se maintiendra dès la première saison (1985-1986). Il ne l’a plus quittée depuis. Sur les feuilles de match de l’époque, seuls deux étrangers pouvaient figurer dans l’effectif. Les plus anciens se souviendront de Bruce Kuszenski, le premier Américain à rester au moins deux saisons à Pepinster. Originaire du Connecticut, Bruce, 208cm pour 104 kg, est arrivé dans la petite cité pepine en 1986 avec sur son curriculum une saison complète de NBA dans les jambes, rien que cela ! Dans son remarquable livre « Matricule 46 », Pierre Raskin, l’ancien secrétaire du club, retrace l’histoire complète de l’institution pepine et  ne manque pas de conter les aventures sportives et parfois extra sportives de tous ces « Ricains » qui sont passés par Pepinster.

Savoureux ! 

 

Aujourd’hui, les nouvelles règlementations de la Fédération belge de basket-ball ont considérablement modifié le paysage du recrutement des clubs de l’élite. Les neuf équipes professionnelles de la Ligue Ethias se doivent de compter au moins quatre Belges dans leur effectif. Une fois cette condition remplie, les dirigeants ont le loisir de recruter « étranger » sans aucune restriction. Pour la saison 2010-2011, c’est la présence de cinq  joueurs belges qui sera d’ailleurs imposée à ces mêmes clubs.  

Cette saison, VOO Verviers-Pepinster compte en ses rangs six joueurs américains. Vous les avez probablement déjà croisés au hasard d’une petite balade dans les artères verviétoises puisqu’ils habitent au centre ville à deux pas de la place du Martyr. Le parcours de ces « grands garçons » étonne très souvent les non-initiés.

Qu’est-ce qui les attire dans un pays aussi vaste qu’un confetti en regard du continent américain ? Pour mieux comprendre le phénomène, il faut d’abord savoir que tous ces athlètes qui peuplent les équipes professionnelles européennes mais aussi sud-américaines, asiatiques et océaniques sont tous passés par le championnat universitaire baptisé NCAA (National Collegiate Athletic Association).

La NCAA, la plus grande association sportive universitaire du monde, organise et règlemente également quantité d’autres sports tant masculins que féminins. En matière de basket-ball, l’élite de la NCAA comprend 33 conférences (championnats) au sein desquelles militent plus de 300 équipes. Ajoutez à cela la NCAA II et III et vous comprendrez que chaque année c’est un nombre considérable d’aspirants qui rêvent d’une carrière professionnelle aux USA ou de par le monde.

 

Pour approfondir le sujet et à quelques jours du derby entre Belgacom Liège Basket et VOO Verviers-Pepinster, Best of Verviers a rencontré pour vous Jean-Pierre Darding, le manager actuel de la phalange liégeoise et ancienne cheville ouvrière du « Matricule 46 » dont il a partagé l’histoire de longues années durant.  

B.O.V. : La NCAA constitue une gigantesque réserve de recrutement pour de nombreux managers dans le monde. Le recruteur que vous êtes suit-il en permanence le championnat universitaire américain ?

JP Darding : Il est évident que la NCAA est le plus grand réservoir, mais actuellement, il ne faut pas négliger l’émergence de contrées plus pauvres où sommeillent des talents incomparables et très motivés. Le continent africain et les pays de l’ex-rideau de fer sont de ceux-là. On ne peut plus considérer uniquement le marché prospectif américain, car il n’est plus aussi décisif que par le passé dans le cadre de la formation. La progression du niveau du basket européen, surtout dans ce domaine de la formation, modifie la hiérarchie en place depuis des décennies.

 

 B.o.V. : De mieux en mieux côté, le championnat belge offre-t-il une vitrine aux joueurs américains désireux d’évoluer dans des compétitions plus huppées ?

JP Darding : Le championnat belge offre une vitrine extraordinaire aux joueurs étrangers (pas seulement américains). Il est évident que les salaires offerts ne sont pas en rapport avec ceux des pays européens dominants (Espagne, Grèce, Italie, Turquie...). Le niveau des étrangers  évoluant  en Belgique est surtout mal évalué par les autochtones qui ont tendance à sous-estimer leurs grandes qualités. Les exemples de réussite dans les championnats européens les plus huppés sont les meilleures preuves de ces affirmations. Je me contenterai de citer quelques cas de joueurs avec une réussite ultérieure impressionnante : JR Holden, Mirza Teletovic, Thomas Kelati, Greg Brunner, Marcus Faison, Mo Finley, Justin Gray, Derrick Obasohan et une quantité d’autres dont les noms ne me reviennent pas à l’esprit. Sans oublier les Belges qui au travers de notre compétition ont pu démontrer l’étendue de leurs talents aux yeux des recruteurs étrangers : Axel Hervelle, Didier M’Benga, Dimitri Lauwers, Sam Van Rossom sont parmi les Belges les plus connus.


B.o.V. : Parmi tous les joueurs « made in USA » que vous avez côtoyés à Pepinster, pourriez-vous nous désigner vos trois plus belles trouvailles ?   

JP Darding : Il est difficile de comparer des époques différentes, car il y a eu une grande évolution dans la constitution des équipes et surtout dans la progression de l’engagement physique et des possibilités athlétiques, sans oublier les changements essentiels de règles (ligne des 3 points en 1980). Sur une septantaine de choix en l’espace de plus ou moins 20 ans, je retiendrai les joueurs qui ont eu le plus d’impact surtout en matière de fidélité, d’adaptation et qui ont permis au club de Pepinster de grandir harmonieusement. James Gulley et Carven Holcombe ont été les premiers déclencheurs de la passion pépine dans une petite salle archicomble. Qualitativement, Marcus Faison nous a éblouis par sa classe et sa consistance ; Bruce Kucscenski par sa puissance et sa détermination. Andrew Kennedy (sur 6 mois de présence) nous a permis d’espérer et de rêver d’un titre (finale perdue contre Malines).

 

 B.o.V. : L’effectif liégeois a accueilli cette saison deux nouveaux joueurs venus de l’Est. La présence du coach croate Dario Gjergja à la tête de Liège Basket n’est pas étrangère à ces arrivées. Comment expliquer la frilosité qu’ont les clubs belges aujourd’hui à lorgner « vers l’Est » ?

JP Darding : Dans l’effectif liégeois, il est évident que la connaissance du marché de l’est de la part de Dario Gjergja a permis l’engagement de jeunes joueurs prometteurs. Il faut savoir que les prix pratiqués pour les joueurs réputés originaire de ces pays, est souvent prohibitif et assez inaccessible pour les clubs belges (à l’exception des 3 plus nantis). Le marché est noyauté par des agents, intermédiaires puissants qui dictent leur loi.

 

 B.o.V. : Voilà trois mois que la compétition belge bat son plein. Quel « rookie » américain arrivé cette saison au sein de la Ligue Ethias vous a le plus séduit chez vos adversaires et pourquoi ?

JP Darding : La compétition belge est actuellement un peu « folle » et le classement réserve des surprises de grosse dimension. La mauvaise réussite des grosses cylindrées réputées interpelle ; tel est le cas de Mons et d’Ostende ainsi que, dans une moindre mesure, d’Alost et de Louvain. Par contre, Pepinster, menacé dans son existence, réalise un début de saison extraordinaire, grâce à une motivation et une solidarité de tous les instants. Le recrutement de « Américains pépins » est remarquable;  il est difficile d’en mettre un en exergue, étant donné l’évolution de leurs performances respectives. Pour ma part, parmi les découvertes que nous a offert la Ligue Ethias,  j’apprécie beaucoup la détermination, la modestie et l’engagement physique de Chris Devine (ndlr. : Verviers-Pepinster) qui malheureusement a été blessé et est hors course depuis quelques semaines. J’espère pour lui un rétablissement rapide et complet qui devrait lui permettre de ravir à nouveau  les formidables supporters pepins dont la fidélité mérite récompense. Je me réjouis de me retrouver au mois de mai pour tirer les conclusions d’un championnat dont aucune surprise n’est à  exclure. Il faut remonter loin dans les archives du basket belge pour retrouver une compétition aussi disputée que celle que nous connaissons en cette année. Et c’est avant tout le basket qui en ressort grand vainqueur. 

 

Si les supporters pepins ont retrouvé le sourire depuis octobre, c’est avant tout parce que, sportivement, ils ont autre chose à se mettre sous la dent que la saison dernière. « Autre chose » c’est d’abord une parfaite alchimie entre les six joueurs américains et les jeunes Belges qui composent l’équipe. Tous travaillent dur et aucun ne désire tirer la couverture à lui. Car un sport collectif reste pratiqué par un groupe d’individualités.

Dans le cas présent, elles sont gommées lors de chaque match au bénéfice d’une envie de mouiller le maillot qui pousse le public à se passionner davantage. Vous avez dit spirale positive ? Ensuite, en pleine reconstruction, le RBC Verviers-Pepinster avait besoin de joueurs de défis. L’histoire de chacun d’entre eux nous révèle que l’amalgame tous ces destins croisés fleuraient bon le parfum de la réussite. Jugez plutôt !

 

Niels Marnegrave (Belge, 23 ans)cherchait à prouver qu’il valait mieux qu’une place de 11ème homme à Mons-Hainaut.

 

Maxime De Zeeuw (Belge, 23 ans) tenait à assumer son titre de « meilleur espoir 2008-2009 » en faisant preuve d’une plus grande régularité dans ses prestations.

 

Thomas Creppy (Belge, 19 ans) voulait enfin décoller après quelques passages remarqués mais non concrétisés à Charleroi et Ostende.

 

Anthony Chada (Belge, 20 ans) piaffait à l’idée de se relancer après une nouvelle opération au genou.

 

Gaël Hulsen et Gaël Colson (Belges, 19 et 20 ans) désiraient plus que tout apprendre pour surprendre avec un temps de jeu pourtant réduit.

 

Brandon Freeman (Américain, 26 ans) cherchait une équipe qui lui permette de prouver qu’il n’était pas qu’un scoreur insatiable.

 

Stanley Burrell (Américain, 25 ans) voulait oublier sa douloureuse première expérience européenne à Sarajevo et mettre enfin en valeur ses qualités de rassembleur.

 

Chris Devine (Américain, 25 ans) rêvait du vieux continent pour user de son jeu athlétique en efficace travailleur de l’ombre qui sied tant au jeu européen.

 

Parmi les meilleurs joueurs de la NCAA II de sa génération, Anthony Hilliard (Américain, 23 ans) espérait démontrer que la NCAA I n’était pas la seule référence en matière de recrutement.

 

Après deux saisons chez nos voisins hollandais, Darnell Wilson (Américain, 24 ans) voulait franchir un palier et attester qu’il pouvait rivaliser avec des adversaires d’un autre calibre.

 

Enfin, John Tofi (Américain, 25 ans), celui qu’on disait fini pour le sport de haut niveau, cherchait une équipe prête à relever le défi de sa vie : redevenir joueur professionnel. Avec presque trois saisons d’inactivité dans les jambes, John a franchi l’Atlantique pour un pari insensé que seul le RBC Verviers-Pepinster pouvait relever à ses côtés. Son histoire colle tellement bien au passé récent d’un club qui fut à deux doigts de disparaître. Les fans l’ont compris et Mister Tofi est devenu un emblème à lui tout seul. Et le succès est au rendez-vous puisque qu’il est à quelques places du Top 20 des joueurs les plus réguliers du championnat, loin devant certaines valeurs que l’on pensait plus sûres.  

 

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Mise à jour le Mardi, 05 Octobre 2010 05:53