Affut de luxe chez l'ami Robert
Écrit par Jean-Marie Poncelet   
Mardi, 22 Février 2011 20:09

 Mais qu'il a eu une bonne idée, l'ami Robert, de transformer son abri de jardin en affut. On ne peut pas dire qu'il ait fait les choses à moitié. Tout d'abord, il a changé la vitre de la porte par un plexiglas découpé pour pouvoir passer facilement l'objectif. Ensuite, il a fixé un support pour l'appareil pour que l'attente soit moins pénible.

Et enfin, cerise sur le gâteau, il a même installé un petit chauffage. J'ai rarement fréquenté des affuts aussi luxueux. De plus, Robert doit aimer le théâtre, car le décor, qu'il a installé pour que les photos des oiseaux au nourrissage soient les plus naturelles possible, est digne d'un metteur en scène.

Souches, troncs d'arbres de différentes hauteurs et branches diverses ont été placés de telle manière qu'ils soient facilement photographiables depuis l'affut et avec souci du détail puisque les cavités recevant les graines et autres nourritures sont soigneusement dissimulées.
En route, je vous y emmène. Ce n'est pas loin, c'est sur les hauteurs de Verviers.


Pour cette partie photographique, j'ai choisi de prendre un zoom plutôt que de sortir le gros téléobjectif, car, pour une fois, les oiseaux seront assez proches. Arrivé sur place, je gare ma voiture et contourne la maison par le jardin à rue. Je longe l'habitation et m'arrête un instant avant d'être sur la pelouse. De cet endroit, je vois l'abri de jardin ainsi que les postes de nourrissage. J'observe, je regarde sur les troncs et dans la haie: ce serait trop bête de faire fuir l'un ou l'autre oiseau peu commun. A part quelques Moineaux domestiques et des Mésanges, je ne vois rien de spécial.  Avant de m'assoir confortablement dans ce luxueux affut, je remplis les mangeoires et les cavités dans les troncs, jette un peu de graines au sol. Voilà, tout est en place. Je m'installe, j'attache mon appareil sur le support, je suis prêt.


La scène est parfaite, le temps est plus ou moins lumineux, la neige fait ressortir la couleur des arbres. Mais, comme dans toute représentation, même si le décor est exceptionnel, la prestation des acteurs est prépondérante. Quand vous allez au théâtre vous êtes certains que les acteurs joueront; ici, ce n'est pas gagné d'avance. Les oiseaux viendront-ils?

 

Je ne dois pas attendre très longtemps. Voici quelques Mésanges: des charbonnières et des bleues. Elles restent un court instant dans la haie, puis se jettent sur la nourriture fraîchement déposée. Il faut dire qu'avec ce froid, elles ont d'énormes besoins pour pouvoir subsister. Je fais une petite série de photos que je visionne directement sur l'écran arrière de l'appareil et je peaufine les réglages. Tiens, voici un Pinson des arbres, plus méfiant, il saute de branche en branche pour se rapprocher de la nourriture convoitée. Malheureusement pour moi, il est caché par les branchages de la haie. Je le fixe avec mon appareil et attends l'instant où il sera à découvert. C'est un mâle, le petit rayon de soleil qui l'illumine fait ressortir son beau poitrail brun rouge. Il n'est pas pressé... mais moi non plus. Il me faudrait bien une paire d'yeux supplémentaire, car d'autres oiseaux se sont rapprochés. Je vois des Moineaux domestiques, des Moineaux friquets, un Accenteur mouchet et toujours les Mésanges. Et le Pinson n'a toujours pas bougé. Peut-être que la douce chaleur relative engendrée par le rayon de soleil a sur lui un effet apaisant ou reposant.

 

Accenteur mouchet


Je décide de changer de cible. Je vais pendant plusieurs minutes mitrailler, tour à tour, les différentes espèces présentes. Le Pinson, lui, est toujours au même endroit, si je ne l'avais pas vu arriver, j'aurais pu croire qu'il était empaillé. Soudain, j'entends un cri, difficile de vous de le décrire précisément, une note explosive courte, sèche et haut-perchée, c'est un Pic épeiche.

Mais, où est-il? Je ne le vois pas.

J'espère qu'il va venir. Tout à coup, il est là, sur le tronc devant moi. Il observe, je crois même qu'il m'observe. Je ne bouge pas, mais je suis prêt. J'ai déjà le doigt sur le déclencheur. Il se détend et commence à piquer le tronc. Précisément, il mange la graisse et les graines qu'on a intentionnellement placées dans un trou. Je lâche une courte rafale, il continue à manger. Je dis "il", car c'est un mâle que l'on reconnait au rouge qu'il a dans la nuque. Je vais calmement faire une belle moisson de photos de cet oiseau.

Il vient à peine de s'envoler, qu'il revient. Mais non, ce n'est pas lui. J'ai devant moi, à quelques mètres, un Pic mar. Robert m'avait dit qu'il venait parfois et seulement depuis cet hiver. Cet oiseau à lui seul valait le déplacement. C'est la première fois que je peux le photographier dans de bonnes conditions.

 

  PIC EPEICHE et PIC MAR

Un peu plus petit que son cousin le Pic épeiche, il s'en distingue notamment par sa somptueuse calotte rouge, par la couleur rouge rosé pâle de la zone anale, par les stries foncées sur les flancs et les taches noires discontinues sur les joues et sur le cou.

Il est très sympa: il change de position, change de support et le voici, maintenant, pendu à une boule de graisse à deux mètres de moi.

J'ai été bien inspiré de prendre le zoom, car avec le téléobjectif, je n'aurais pu le photographier en entier. Je profite de l'aubaine et, en plus des photos, je filme une courte séquence. Il s'envole, chassé par le Pic épeiche qui revient au ravitaillement.

 

Sur l'instant, je ne   fais pas attention à cet oiseau, mais en prenant la première photo, je me rends compte que ce n'est pas le mâle, mais bien la femelle du Pic épeiche. C'est super de photographier le couple lors d'une même séance. Ce serait encore beaucoup mieux d'avoir les deux sur la même photo, mais là je suis trop gourmand!

Pendant les deux heures qui vont suivre, je vais me régaler: les trois Pics vont revenir tour à tour, les Mésanges, les Moineaux, l'Accenteur et des Pinsons vont se succéder. Un grand et beau ballet pour un seul spectateur: moi.

Enfin, ce n'est pas tout à fait vrai, car il y a eu un autre spectateur pendant une bonne partie de la représentation: le Pinson sur sa branche! Je l'ai observé de temps en temps, il restait fidèle à lui-même, sans bouger. Un grand timide, sans doute, car il est parti discrètement, je ne l'ai pas vu s'envoler et je suis reparti sans une seule photo de lui.

 

Mesange charbonnière

 

N'oubliez pas que les oiseaux ont besoin de vous surtout en hiver, offrez-leur de la nourriture (pas de pain: ils ont alors la sensation d'être rassasiés, mais ils n'ont pas les calories nécessaires) et de l'eau sans aucun additif. Vous serez récompensés par le spectacle qu'ils vous offriront.

 Portrait de Pic


Bonnes observations, bonnes balades et à bientôt.
jean-Marie Poncelet
www.jmponcelet.be

Mise à jour le Samedi, 05 Mars 2011 10:17